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Dans les joies et les drames de ma vie, mes mains sont mes yeux. La main gauche pour moi, la main droite pour les autres. Se servir des deux mains est à la base de toute réflexion sur son propre corps. Mes deux mains ne sont jamais en accord parfait, je me laisse donc influencer soit par l’une, soit par l’autre. Elles circulent librement et épousent la matière. Parfois le vide, parfois le plein, jamais de prise. L’eau est beaucoup moins souple qu’on pourrait le croire, et la pierre n’est pas forcement si dure… C’est peut-être la main qui adapte et qui s’y adapte. Le choix de mon métier est intimement lié à cet affect que j’ai pour la matière textile et le sens du touché. Je le dis d’autant que j’ai pu touché tant et tant de choses exceptionnelles. Cette étoffe je l’ai construite, déconstruite, modifiée, respectée. Les métiers du patrimoine sont les parents pauvres de la politique, au delà d’être des gardiens des trésors, nous sommes des passeurs de mémoires. Nous avons à rapprocher les gens des objets d’histoire. Et pour cela mes mains sont toujours devant. Mon geste de dissident se cantonne aux trous au bout de mes gants blancs. Quand un petit trou se présente, je le laisse doucement grandir jusqu’à sentir subrepticement la peau des étoffes… Nous sommes obligés de travailler avec les mains habillés et le meilleur moment de la journée, c’est le striptease du jour, quand on les enlève.
En las alegrías y las penas de la vida, mis manos son mis ojos. La mano izquierda la guardo para mi, la mano derecha es para los que me rodean. Utilizar las dos manos a la vez es la base de toda reflexión sobre el propio cuerpo. Mis dos manos nunca andan en perfecto acuerdo, me dejo influenciar por la una o la otra. Las dejo circular con libertad y abrazar la materia. A veces el vacío, a veces el lleno, sin forzar. El agua suele ser mucho menos fluida de lo que imaginamos y la piedra no es tan dura como parece. Sin duda las manos la adaptan y se adaptan. La elección de mi profesión está intimamente ligada al afecto que me une a la materia textil y al sentido del tacto. Lo digo con la experiencia de haber podido acercarme a objetos excepcionales. Esta materia textil la he construido, desconstruido, transformado, respetado. Los oficios de patrimonio son los parientes pobres de la política, más allá de ser guardianes de tesoros, somos transmisores de memoria. Toda nuestra actividad está ligada a la preservación de las obras de arte. Acercar las personas a los objetos de historia, es parte de nuestra misión. Para ello mis manos siempre anda por delante. Mi gesto disidente se limita a los pequeños agujeros en la punta de los dedos de mis guantes blancos. Cuando un agujerito se crea, le dejo crecer lentamente, hasta sentir de forma imperceptible la piel de los tejidos. Tenemos que trabajar con la manos vestidas y el mejor momento del dia es el striptease cuando las manos se desnudan.
Textes et Images Anne de Vandière 2008
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